Rappelons le contexte : nous sommes tout début 1998, Internet et le Web ont tout juste 3 ou 4 ans. Un marché tout neuf dans lequel tout est à inventer.
Pour ce qui me concerne, j’ai proposé mes premières offres de référencement en Janvier 1996 et j’ai déposé la marque en Juin 1996…mais personne n’était disposé à payer pour quelque chose qui était disponible gratuitement au travers des formulaires d’inscriptions sur les annuaires et moteurs de recherche.
Lorsque je décide de créer une entité juridique pour NetBooster, j’ai un double challenge à remplir : faire connaître le service pour le développer et arriver à en vivre.
L’objectif à atteindre était :
A mes yeux la stratégie à mettre en place tenait en 3 points :
Pour le premier point, se faire connaître à l’époque ne pouvait passer que par l’obtention d’un soutien presse. A l’époque les journaux et magazines étaient très friands de nouveautés autour de l’internet. Obtenir des papiers n’était pas le plus difficile à condition de s’en occuper sérieusement.
Ainsi je fis le choix d’investir immédiatement dans une agence RP plutôt que dans un salaire de commercial.
L’Agence Text100 a été choisie et a très bien fait son boulot puisque j’ai très rapidement eu l’honneur de la presse magazine.
Pour le second point afin de me rendre crédible, je décidais d’écrire un livre expliquant en quoi consistait le référencement, quels en étaient les avantages et surtout le « Comment faire » décrivant en détail ma méthodologie.
J’y dévoilerai la méthode des « pages alias » qui me permettait à l’époque d’obtenir des résultats spectaculaires dans les moteurs de recherche et les annuaires. En particulier dans AltaVista avant que n’arrive Google !
Un petit fascicule ressemblant fortement aux livres blancs qui foisonnent maintenant sur le web, mais que je souhaitais diffuser en format imprimé uniquement.
« Référencement – Les secrets du référencement de votre site web sur l’Internet » sera publié en Janvier 1998 et sera suivi par 3 autres ouvrages traitant du référencement et du marketing en 1999, 2001 et 2006.
Pour le troisième point et la nécessité de vendre mon service, je choisis de m’adresser aux agences web plutôt qu’aux clients finaux. La raison en est simple : les agences étant à l’origine de la création des sites ne devraient pas avoir beaucoup de mal à proposer mes services à leurs clients.
Démarcher une agence, c’était autant de travail que démarcher un client final avec à l’arrivée la possibilité d’obtenir plusieurs contrats.
Bingo et premier succès avec Imaginet et Patrick Robin qui fut mon premier client agence et me confiait quasi systématiquement le référencement des sites qu’ils développaient.
Ainsi avec ce dispositif je devais être théoriquement à même de démarrer l’entreprise et commencer à en vivre. Effectivement, les résultats étaient là et encourageants. Je sentais que la stratégie était bonne mais pas suffisamment dynamique pour aller vite.
La stratégie définie étant en place, il était temps d’accélérer. D’autant que j’étais seul à faire tout le boulot et que le rythme que je soutenais ne pourrait pas durer très longtemps.
Jugez-en : au quotidien, je me levais à 6H00 pour être au bureau à 7H00 afin de réaliser les prestations de référencement qui avaient été vendues.
A 10H00 je démarrais ma chasse au client par téléphone. Sandwiche pour déjeuner et déplacement l’après-midi chez les prospects pour leur expliquer le référencement et essayer de leur vendre mes prestations. Basé à Versailles et prospectant sur Paris le déplacement me prenait souvent toute la demi-journée.
Puis en fin d’après-midi encore 2 ou 3 heures de référencement. Diner rapide et retour bureau où je me consacrais à l’écriture du livre jusqu’à environ minuit. Soit des journées de 18H00 en moyenne et 7/7…
La stratégie commençait donc à porter ses fruits. J’avais des clients qui assuraient les frais de roulement de l’entreprise. On commençait à parler de moi dans les magazines, mon livre venait d’être publié et j’en livrais un ou deux tous les jours.
Pas mal pour un nouveau métier sur une nouvelle industrie, mais pas suffisant à mon goût.
D’autant que pour recruter des collaborateurs, il fallait passer à la vitesse supérieure !
C’est à ce moment-là, Février 1998, que je prenais connaissance du fait que le fameux « Festival du film d’entreprise de Biarritz » ajoutait un volet Web à sa compétition.
Y voyant une opportunité, sans tarder, je décrochais mon téléphone pour appeler ses organisateurs et leur faire part de mon souhait de proposer un Grand Prix NetBooster au lauréat de la compétition. Grand Prix assorti d’une année entière de référencement pour le site du vainqueur.
L’idée leur plut et je me retrouvais quelques jours plus tard dans les bureaux du Festival pour faire connaissance et élaborer une formulation à ma proposition.
« Monsieur Eskenazi, nous acceptons votre proposition à une condition : il faudrait que vous soyez disponible pour siéger au jury du Web qui notera les sites dans les différentes catégories de la compétition ».
Je ne réfléchissais pas plus de quelques minutes pour leur faire savoir que j’acceptais malgré la difficulté que je voyais à m’absenter près d’une semaine de Paris au moment où je commençais à avoir pas mal de travail sur la table.
Et je me retrouvais un mardi du mois de Juin à Biarritz à passer mes journées à visualiser les sites web que les entreprises et leurs agences présentaient en compétition. Inutile de dire que la qualité des sites de l’époque n’avait rien de comparable au web que nous connaissons. Mais la démarche était intéressante et en même temps me permettait de nouer des contacts qui me seraient utiles en prospection ultérieurement.
Arriva le Dimanche soir et la cérémonie de clôture présentant le palmarès du Festival du film de Biarritz 1998. Devant un parterre de quelques 400 professionnels du Web, défilent les uns après les autres les lauréats par catégories. Meilleure thématique, meilleure démarche marketing, meilleure agence, etc.
Et en finale le Grand Prix est décerné à L’Oréal ! Avec dans la foulée le présentateur qui annonce : « Maintenant j’appelle sur scène Monsieur Eskenazi et la société NetBooster qui va décerner le Grand Prix NetBooster au lauréat ».
Je montais sur scène pour remettre un trophée au représentant de L’Oréal présent et après quelques mots dont j’ai oublié la teneur recevais, en jubilant, les applaudissements du public ravi de terminer en beauté ce premier Festival du Web de Biarritz.
Le plus extraordinaire est que personne dans le public ne me connaissait, mais tous ont pensé que NetBooster était un prestataire du web américain. Dès le lendemain en prenant la route du retour, dans ma voiture, le téléphone s’est mis à sonner pour me demander des rendez-vous et il ne s’est plus jamais arrêté de sonner…
Un mois après je déménageais dans un bureau de 100m2 toujours à Versailles et recrutais ma première collaboratrice.
C’est à cette époque que NetBooster a rencontré son véritable succès et s’est développée à grande vitesse. La levée de fonds effectuée au printemps 1999 à ensuite permis d’accélérer sa croissance.
Voilà donc la stratégie que j’ai imaginée, organisée et mise en œuvre pour arriver à atteindre les objectifs que je m’étais fixés…Merveilleuse histoire d’entrepreneur dont je ne suis pas peu fier !
Jean-Pierre Eskenazi